Poker en ligne : Winamax, entre blanchiment d’argent et violation de la réglementation…

Publié le 04/10/2022

Winamax est une nouvelle fois dans la tourmente. Déjà fortement critiqué pour son marketing agressif — le site cible volontairement les jeunes démunis qui vivent dans les banlieues et fait de la publicité mensongère en laissant croire que les jeux en ligne peuvent contribuer à un changement de statut social —, l’opérateur n’obtiendra décidément jamais les faveurs de l’ANJ, le régulateur ayant rejeté l’ensemble de son plan marketing pour 2022.

En effet, Mediapart a eu accès à un dossier judiciaire qui montre que la plateforme de poker en ligne (et de paris sportifs) n’a pas respecté ses obligations légales en matière de lutte contre le blanchiment d’argent. Winamax, dirigé par Alexandre Roos et Christophe Schaming, n’aurait pas effectué le moindre signalement à Tracfin au cours des sept dernières années…

Descente de police dans les locaux de Winamax : les patrons suspectés

En septembre et novembre 2021, les enquêteurs du Service Central des Courses et des Jeux (SCCJ) avaient perquisitionné le siège de Winamax à Paris dans le cadre d’une affaire de blanchiment et de prêts d’argent illicites émanant du Paris Élysées Club, très proche de l’opérateur français de poker en ligne. À cette occasion, les policiers ont découvert que l’un des protagonistes du dossier d’instruction avait réalisé un versement illégal de 325 000 € depuis un compte en banque suisse sur son compte joueur Winamax, et ce sans que le service anti-fraude de l’entreprise ne sourcille !

L’enquête a donc été étendue à Winamax et d’importants problèmes dans la prévention du blanchiment d’argent — dont trois violations majeures de la réglementation —, ont été décelés. Ainsi, entre 2010 et 2018, Winamax n’a effectué aucun signalement à Tracfin, le service anti-blanchiment de Bercy, alors que cela constitue une obligation légale.

Mais ce n’est pas tout. Pendant onze ans, Winamax a accepté des fonds provenant de pays se trouvant en-dehors de l’Union Européenne ou de comptes d’entreprises, ce qui est totalement illégal. Certains de ses paiements ont été réalisés depuis la Suisse, un paradis fiscal. Parmi ceux-ci, il y en a trente-trois qui sont originaires de sociétés, et constituent donc des abus de biens sociaux.

Selon un salarié du pôle anti-fraude de Winamax interrogé par la police en novembre 2021 : « C’était permis, nous n’avions pas d’instruction à l’encontre de ce type de transactions. La consigne d’interdire les versements de ce type n’a été donné qu’après la garde à vue de Christophe Schaming ». Décidément, cela ne sent pas bon pour Winamax !

Le cas Charif A, consultant et plus gros client de Winamax

Rappelons que les ennuis de Winamax et du Paris Élysées Club ont débuté suite à la mise en examen de Charif A, soupçonné d’avoir supervisé un système présumé permettant aux joueurs d’emprunter de l’argent et d’acheter des jetons en liquide sans passer par les caisses. Ce dernier, consultant pour le groupe Tranchant, est également le plus gros joueur de Winamax.

Joueur de poker en ligne et parieur compulsif, Charif A, connu sous le pseudo « El Saatan », a misé pas moins de 7,1 millions d’euros sur Winamax entre 2018 et 2020, n’en perdant que 642 000. Ce dernier est poursuivi pour « blanchiment aggravé », « blanchiment de fraude fiscale », « prêts d’argent illégaux » et « abus de biens sociaux ».